Douglas Davis
Né en 1933 à Washington


  Né à Washington en 1933 (études à la Rutgers University, Washington), il travaille non seulement avec des moyens électroniques et de communication, mais aussi avec le dessin, la photographie, la sérigraphie et la performance. Davis est avant tout aussi un théoricien, un éditorialiste d'ouvrages sur la théorie de la culture et l'histoire de l'art et aborde l'art en relation avec la communication et la technologie, notamment en ce qui concerne l'avenir. Son ouvrage "Art and the Future - A history/prophecy of the collaboration between Science, Technology and Art" est paru en 1973. Il fut l'un des premiers en 1972 à se prononcer clairement au Forum de l'Art sur l'existence et les possibilités de la vidéo comme forme artistique.

  Le texte, c'est-à-dire la langue en tant que méthode de communication en général, est souvent intégré dans ses travaux vidéo, ses objets et ses installations. Comme il le souligne dans un volume d'essais sur la nouvelle forme de télévision (The new Television, 1977) dont il est l'auteur, la question de la simultanéité, de la signification de la transmission directe en temps réel dans le contexte culturel d'aujourd'hui revêt une importance capitale pour lui. Il aborde ainsi un des problèmes souvent négligés des médias de communication et de la capacité de représentation de l'être humain par rapport au facteur temps dynamique. [...]

  Les idées des artistes Fluxus de New York ont inspiré Douglas Davis, à savoir qu'il intègre également le public ou le spectateur dans son travail, tout en présentant simultanément la confrontation avec lui-même dans la présentation. Les rencontres avec Paik, Beuys, Acconci, Campus, Baldessari et les conceptualistes sont pour Davis très importantes. Tout comme Paik et d'autres, Douglas Davis s'est intéressé à la manipulation, au renoncement et au refus de la télévision, avec par exemple son installation Images for the Present Tense dans l'exposition Projekt'74 à Cologne, où il tourne contre le mur une télévision dont l'écran lumineux et grésillant, détournée de sa destination première devient source de lumière et de réflexion.

  L'artiste utilise en partie des images de ses performances dans ses travaux graphiques : une image de Reading Brecht in ¾ Time (1976) a été transposée dans la série Keeping Time avec phototypie et encre de couleur. L'action elle-même a été produite en collaboration avec la chaîne de télévision cablée Manhattan. La lecture qui a duré deux jours, dans trois endroits différents, s'adressait autant au spectateur public qu'au spectateur privé, les distances spatiales étant franchies grâce au câble. On devine déjà ici l'emploi par Davis de la télévision par câble pour des actions vidéo et simultanées dans différents lieux, avec la télévision qui met l'accent sur les caractéristiques de la télécommunication globale.

C'est en 1976 également qu'il réalise en collaboration avec les artistes russes Vitaly Komar et Alexander Melamid Questions New York Moscow New York Moscow, un travail d'un an se composant de collages de photos, de textes et de coups de téléphone. Les photos prises simultanément par Komar & Melamid à gauche derrière une ligne noire verticale sur fond blanc et de Douglas Davis à droite de la ligne franchissent visuellement la distance existante. Les artistes tiennent des panneaux avec des questions- les Moscovites des quetions en anglais et Douglas Davis des questions en russe : " Where is the line between us", "Why is the line between us" et "What is beyond the line", essayant ensuite de se contacter par téléphone, mais en vain.

Two Cities, A Text, Flesh and the Devil traite du thème de la synthèse des échanges visuels d'une action réalisée dans plusieurs endroits. Four Places Two Figures One Ghost (1977) est la première retransmission en direct d'un musée. Deux personnes jouent, via la télévision par câble, pour le spectateur, l'une en directe, l'autre à partir d'une bande, et observent un troisième personnage, l'esprit de l'ancien Moi de Douglas Davis, qui laisse un message sur la machine à écrire vidéo.

Dans The Last Nine Minutes présentée lors de documenta 6 à Kassel en 1977, Douglas Davis abandonne la vidéo pour une retransmission par satellite de sa performance en direct dans l'Orangerie, où il prenait contact par la main avec une personne de Caracas, au Venezuela. Dans le texte d'accompagnement, Douglas exprime clairement son intention de faire disparaître en neuf minutes la distance entre deux interlocuteurs potentiels via le satellite et d'entamer un véritable discours.

Nous retrouvons également ce thème dans "Double Entendre" (1981) : deux musées - le Centre Georges Pompidou et le Whitney-Museum - sont reliés par satellite et Douglas Davis et Nadia Taleb récitent dans leur propre langue un discours basé sur les "Fragments d'un discours amoureux" de Roland Barthes . La caméra filme Davis qui sort précipitamment du musée, se retrouve dans Madison Avenue et réapparaît sur la place du Centre Pompidou à Paris où il rencontre Taleb.

Les TV et vidéos par satellite servent ici uniquement de véhicule pour un mouvement réel. Davis se demande - à juste titre - la raison de ces transmissions par satellite : "To what end? For what purpose? The same purpose that lies behind the invention of language, of the portable canvas painting, at home in any living room, of the photograph. To reach out, to contact a man, a woman, to consumate the ideal of human fraternity - by communicating a thought..."

...car le réel idéal, c'est la communication entre les êtres humains et le partage d'une idée commune.

Liliane Haberer


Fermer